Fiscalité : premières mesures Macron

Paru dans JV 62 - Septembre 2017 | Texte : Frédéric Lejoint

Les réformes fiscales entreprises par le président Macron vont favoriser les détenteurs de capital mobilier, et donner moins d’arguments aux candidats à l’expatriation.
Les retraités et les détenteurs de patrimoine immobilier seront les grands perdants des réformes en cours, qui commenceront à prendre effet au 1er janvier 2018.

L’arrivée d’Emmanuel Macron à la tête de l’État devrait marquer un changement de cap dans la fiscalité sur le patrimoine en France. L’Observatoire Français des Conjonctures Économiques (OFCE), classé à gauche, vient de réaliser une étude sur l’impact des mesures fiscales prévues, dont il ressort que la baisse d’impôt devrait totaliser 9,1 milliards d’euros, soit en moyenne une hausse de 1,4 % par ménage ou 324 euros. Voici les principales mesures fiscales qui devraient entrer en application durant les 18 prochains mois.


Premier projet emblématique du gouvernement d’Édouard Philippe, l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) devrait officiellement disparaître et devenir l’Impôt sur la Fortune Immobilière. Depuis sa fondation, l’ISF exonérait une partie du patrimoine des grandes fortunes, en excluant de l’assiette certains biens comme les forêts, les œuvres d’art ou les biens professionnels. Le patrimoine mobilier (actions, obligations) était toutefois inclus dans l’assiette, et avec la baisse des taux intervenue ces dernières années, la ponction de l’ISF (qui s’ajoutait à celle de l’inflation) était devenue insupportable pour de nombreux rentiers, ou pour les chefs d’entreprises lorsqu’il revendaient leur société. Cette mesure avait poussé de nombreux Français fortunés à s’expatrier pour bénéficier d’une fiscalité moins agressive, notamment vers la Belgique.
Avec la mise en place de l’IFI, le patrimoine mobilier va également sortir de l’assiette imposable, une mesure qui devrait bénéficier directement aux patrimoines les plus importants et inciter les contribuables français à investir davantage en actions. Les seuils et les taux ne seront pas modifiés, et l’abattement de 30 % sur la résidence principale sera conservé. Pour les expatriés qui disposent encore d’un patrimoine mobilier important en France, l’impact à court terme sera faible ; mais pour les candidats à l’expatriation, cette réforme va probablement différer une prise de décision trop hâtive. L’OFCE estime que l’épargne fiscale future pour les ménages les plus riches devrait dépasser 2,5 milliards d’euros si le texte est voté tel quel.

 


À l’image du précompte mobilier belge de 30 % sur les revenus du capital, prélevé à la source par les banques sur les dividendes et les revenus d’intérêts, le gouvernement d’Édouard Philippe a également prévu la mise en place d’une Flat Tax forfaitaire de 30 % sur les revenus du capital. À l’heure actuelle, les revenus du capital sont globalisés avec les autres revenus, et sont dès lors souvent taxé au taux marginal d’imposition auquel il faut ajouter les prélèvements sociaux, soit une pression fiscale qui va de 15,5 % à 58,21 %. À noter qu’il existe déjà un prélèvement libératoire optionnel à un taux de 24 % jusqu’à 2 000 euros de revenus d’intérêts (pas les dividendes), mais la globalisation avec les autres formes de revenus est obligatoire dès que ce niveau de 2 000 euros est dépassé. Certains contribuables n’auront toutefois pas intérêt à se voir appliquer cette Flat Tax (par exemple parce que leurs revenus sont peu élevés), et ils auront la possibilité de se voir appliquer l’ancien barème.
Édouard Philippe a également tenu à préciser que « les produits défiscalisés (Livret A) resteront exemptés, tandis que l’assurance-vie conservera son régime fiscal actuel. Seuls les nouveaux flux d’investissements au-delà de 150 000 euros seront concernés par le prélèvement forfaitaire ». Ici aussi, cette mesure devrait inciter davantage de contribuables français à investir sur les marchés d’actions. L’OFCE évalue l’impact de ce précompte mobilier à la française à 4 milliards d’euros lorsqu’elle sera mise en application.

 



Comme le précompte immobilier belge, la taxe d’habitation française est calculée sur base de valeurs locatives cadastrales qui ont été établies il y a très longtemps, et qui ne correspondent souvent plus à la réalité du bien actuel. La réforme promise par Emmanuel Macron vise à établir une fiscalité plus en phase avec la réalité, et devrait permettre d’exonérer 80 % des ménages les moins fortunés sur une période de trois ans (d’ici 2020), lorsque le revenu fiscal ne dépasse pas 20 000 euros par an et par part (soit 40 000 euros pour un couple sans enfant, 60 000 euros pour un couple avec deux enfants, etc).
La taxe d’habitation ne serait donc plus essentiellement dépendante de la localisation du bien immobilier et d’un cadastre obsolète, mais bien du revenu imposable du ménage. Cette mesure ne bénéficiera toutefois pas aux résidents fiscaux belges qui détiennent une résidence secondaire sur le territoire français, celles-ci ayant été explicitement exclues du cadre de cette nouvelle mesure. À noter qu’il existe déjà une mesure d’exonération de la taxe d’habitation, mais les conditions pour y accéder sont actuellement assez restrictives et concernent essentiellement des revenus très modestes.

 



La Contribution Sociale Généralisée (CSG) est un impôt qui fut mis en place au début des années 90 sous Michel Rocard dans le but de financer la protection sociale, et qui a vu son taux progressivement augmenter au fil des ans. La réforme de la CSG vise à supprimer les cotisations maladie (0,75 %) et chômage (2,4 %) pour les salariés du secteur privé afin de financer une nouvelle hausse de la CSG (1,7 %) qui devrait en principe compenser la baisse des cotisations, pour un impact budgétaire nul sur les finances publiques. Le taux de la CSG sur les revenus d’activité grimperait ainsi de 7,5 % à 9,2 % dès l’entrée en vigueur de cette taxe au 1er janvier 2018.
Cette hausse de la CSG touchera également les retraités, les fonctionnaires et les indépendants, mais le gouvernement a promis des mesures compensatoires pour ces deux derniers groupes afin que l’impact sur leur pouvoir d’achat soit nul. 60 % des retraités – ceux dont le revenu fiscal de référence dépasse 1 200 euros par mois – seront touchés par cette réforme. Les grands vainqueurs de cette réforme seront les salariés du secteur privé, qui bénéficieront donc d’une hausse de leur pouvoir d’achat, même s’ils devront également supporter une hausse de la fiscalité sur leurs diverses formes d’épargne mobilière. À noter que pour les résidents fiscaux belges qui souhaitent revendre un bien immobilier en France, la hausse de la CSG s’appliquera également. Une plus-value immobilière réalisée moins de six ans après l’achat (et ne bénéficiant donc d’aucun abattement) sera désormais taxée à hauteur de 36,2 % contre 34,5 % auparavant.

 



Une des grandes réformes de François Hollande était l’introduction d’un prélèvement de l’Impôt sur le revenu par les entreprises lors du versement du salaire (comme c’est le cas en Belgique). Emmanuel Macron a reporté d’un an l’entrée en vigueur de cette mesure dans le but de s’assurer que la mise en application de cette réforme se fera sans problème, pour les grandes comme pour les petites entreprises. Le patronat reste actuellement opposé à ce prélèvement automatique, en raison des frais et des contraintes supplémentaires qui seraient à leur charge.

 

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