Les scouts en Belgique

Vendredi 20 avril 2012 | Texte : Julie Galand

Beaucoup de Français sont étonnés par la vitalité du scoutisme en Belgique. Ici, à mille lieues du Hamster Jovial et autres Scout Toujours, vous découvrirez un mouvement ouvert et sympathique, voire un lieu d’épanouissement idéal pour vos enfants.


Si vous vous attendiez à tomber sur un mouvement ultra-catholique à tendance réac’, ou sur de grands enfants un peu candides aux activités désuètes, vous allez tomber de haut. En Belgique, le scoutisme, c’est pour tout le monde. D’ailleurs, avec près de 160.000 membres pour un pays de 10 millions d’habitants, contre seulement 190.000 scouts en France pour une population 6,5 fois plus élevée, on aurait presque l’impression que tout le mon de est - ou a été - scout en Belgique !


Dès les louveteaux, les jeunes apprennent en compagnie des plus grands des techniques qui leur serviront tout au long de leur « carrière scout ». à leur rythme, ils acquièrent ainsi progressivement plus d’autonomie et de responsabilités, jusqu’à enseigner à leur tour ces techniques aux nouvelles recrues.


Mais de quel scoutisme parle-t-on ?


Tout d’abord, il faut savoir que le terme « scout » s’applique, parfois un peu abusivement, à des mouvements de jeunesse plus ou moins inspirés du scoutisme de Baden-Powell mais non-reconnus par l’organisation mondiale du scoutisme. C’est le cas par exemple des « Patro », un mouvement de jeunesse catholique héritier des « patronages » destinés au secours des pauvres, et qui compterait près de 120.000 membres en Belgique, principalement en Flandre. Quant aux « Scouts d’Europe », dont la dimension catholique est beaucoup plus marquée, ils ne se définissent pas eux-mêmes comme un mouvement de jeunesse, et ne sont donc reconnus ni par la Communauté française, ni par l’Organisation mondiale du mouvement scout (OMMS). Celle-ci reconnaît une organisation par pays, soit la plateforme « Guidisme et Scoutisme en Belgique » ici, qui regroupe cinq fédérations :

  • Les Guides Catholiques de Belgique, réunissant près de 25.000 membres.
  • Les Scouts et Guides Pluralistes, comptant quelque 5.000 membres.
  • Les Scouts -Fédération des Scouts Baden- Powell de Belgique, regroupant 54.000 membres environ.
  • Les Scouts en Gidsen Vlaanderen (environ 70.000 affiliés (néerlandophone).
  • Le FOS – Open Scouting (environ 7.200 membres) (néerlandophone).

Différences France/Belgique

 

En France, la principale fédération, reconnue par l’OMMS, est celle du Scoutisme Français, regroupant les éclaireurs et éclaireuses catholiques, protestants, israélites, musulmans ou non-confessionnels pour un total d’environ 80.000 membres. A celle-ci s’ajoutent les Scouts Unitaires de France, et la Conférence Française du Scoutisme, qui chapeaute l’Association des Guides et Scouts d’Europe. Mais cette liste est loin d’être exhaustive, car d’autres mouvements bien plus minoritaires se nomment en référence à la terminologie scoute mais ne sont souvent pas reconnus par le scoutisme mondial, ni même parfois par l’Etat.

Cette prolifération de dizaines d’associations différentes - la plupart, non reconnues - se réclamant du scoutisme ne permet pas de véhiculer une image cohérente et unifiée de celui-ci. Et lorsque les médias évoquent les démêlés de certains avec la justice, ou encore leur caractère extrémiste et réactionnaire, on en oublierait facilement qu’il existe d’autres mouvements tout à fait ouverts et dépourvus de finalité politique ou religieuse. De plus, le mouvement étant moins centralisé et moins important en France, il est moins bien connu du grand public, ce qui favorise sans doute le stéréotype du boy-scout un peu ringard des années 50.

En Belgique, à l’inverse, le taux de participants est le plus haut en Europe, avec 9 % de la population des 5 à 20 ans étant affiliés à l’un des mouvements reconnus. Annick. H., animatrice fédérale des scouts, met en avant d’autres caractéristiques : « Contrairement à beaucoup de mouvements d’inspiration scout, nos unités sont dirigées par des jeunes, une figure d’autorité assez « douce », qui contribue certainement au renouvellement des esprits et des mentalités, et nous permet d’éviter les dérives et récupérations politiques ou religieuses. De plus, les dimensions de la Belgique permettent une meilleure visibilité et une meilleure centralisation des unités. C’est pourquoi, lors des festivités du centenaire du scoutisme, la Belgique a pu réunir plus de 100.000 scouts et guides à Bruxelles, un record mondial ! »

Quelles sont les activités proposées ?

Il y a une dimension ludique évidente, avec les grands jeux de piste, les veillées autour du feu, les ateliers créatifs ou sportifs, etc.

Mais chaque unité développe aussi des projets de service à la société comme planter des arbres ou aider des personnes handicapées. Et puis, lors des camps, chacun participe aux corvées, à l’installation, à la préparation des repas, etc.

La relation à autrui est aussi fondamentale, vis-à-vis des autres scouts, ce que favorise l’organisation en plus petits groupes, mais aussi vis-à-vis des animateurs bénévoles qui jouent un rôle de « levier d’apprentissage », selon les termes de la fédération. Tout en posant un cadre, ceux-ci sont âgés de 18 à 25 ans, et s’apparentent donc davantage à des grands frères ou des grandes soeurs. Qu’est-ce qui motive ces jeunes bénévoles à consacrer autant de leur temps à l’animation des plus jeunes ? Souvent, ce sont d’anciens scouts qui ont tellement aimé ça qu’ils ne sont pas encore tout à fait prêts à décrocher. La dimension plaisir est aussi encore présente dans leurs discours, notamment par l’envie de rendre un peu de ce qu’ils ont reçu et le côté formateur de cette expérience.


Les scouts belges, cathos ou pas ?


Si la dimension spirituelle fait partie du programme de tout mouvement scout, la fédération laisse à l’appréciation de chaque unité, selon ses appartenances, le choix d’en définir la nature, fût-elle athée. Dès lors, elle ne semble pas en mesure d’évaluer la proportion de croyants parmi ses adhérents. Mais Akela, le chef louveteau que nous avons rencontré, confirme les nombreux témoignages que nous avons recueillis : « La plus grande partie des scouts actuels n’est plus vraiment catholique. S’il reste des références dans nos chants par exemple, la fédération propose aussi d’autres chants.Nous, nous avons décidé de garder ces traces, un peu par habitude. Avant, on faisait aussi parfois venir un prêtre, tout en lui expliquant au préalable que tous les enfants n’étaient pas croyants. Cette fois, on n’en a pas trouvé et c’est pas plus mal. » 


Néanmoins, lors de la Promesse à laquelle nous avons assisté chez les éclaireuses, un prêtre avait été invité pour compléter ce rituel scout par une messe de circonstance. « Nous en avions perdu l’habitude, nous explique Chinkara, l’une des animatrices. Mais nos éclaireuses sont pour la plupart issues de la bourgeoisie catholique de Namur, et leurs parents nous en ont fait la demande. Même si l’on n’est pas croyant ou pratiquant, comme moi, beaucoup de détails de nos rites sont surtout vus comme appartenant à la tradition scoute. Finalement, l’idée de certains chants et prières est surtout de dire “merci de ce jour d’existence“. Le père Fabien, ancien scout originaire de Namur, nous explique les raisons de sa présence lors de la Promesse de cette troupe : « Je connais bien cette troupe de Namur. Elle invite souvent un prêtre lors de la Promesse, mais aussi lors de certaines réunions de staff, et au début de l’année. Le fait d’être ensemble et dans la nature comme ça, je pense que ça ouvre au spirituel, et cela donne plus de beauté à la foi, qui n’a pas toujours une aussi belle image. »

 

Folklore et symbolique



La symbolique est essentielle dans le scoutisme, car elle contribue à créer un lien entre chacun, et accentue la dimension initiatique de certains événements. Par exemple, lors de la totémisation, après une série d’épreuves, le scout se voit attribuer un nouveau nom, en référence à un animal. Il est ensuite invité à brûler un papier sur lequel il a écrit son ancien nom : désormais, il ne sera plus appelé par ses camarades que par son nom de totem. De même, le « salut scout », qui consiste à lever trois doigts de la main en maintenant l’auriculaire sous le pouce, signifie « le fort protège le faible ». Quant au foulard, aux cris de patrouilles et autres slogans inventifs et humoristiques, ils ont aussi pour effet de renforcer la cohésion au sein des  groupes. Il en va de même pour le langage spécifique qu’ils utilisent. D’ailleurs, est-ce qu’un non-scout aurait la moindre chance de comprendre une phrase telle que celle-ci : « Frère gris a organisé un hike plutôt que des mowhas pour les sizaines pendant qu’Akela demandait à Alezan de s’occuper du tally pendant la veillée » ? (traduction : le second chef a organiséune randonnée plutôt que des ateliers pour les groupes de six louveteaux pendant que le chef demandait à l’un des scouts de s’occuper du carnet de bord pendant la soirée).

 

Valeurs fondamentales 


« A la base du scoutisme stricto sensu, il y a un projet de développement de l’enfant dans toutes ses dimensions : physique, sociale, intellectuelle et morale ou spirituelle. Le but final est d’en faire un individu autonome, libre, responsable, conscient et équilibré, le tout par une méthode visant l’apprentissage par le jeu », nous explique Annick Hoornaert. « L’accent est mis sur l’action, la découverte, la nature, ainsi que sur l’importance de la notion d’engagement vis-à-vis de la société, mais aussi de soi-même, et des objectifs que l’on s’est fixés. » Pour Claire, alias Chinkara, chef scoute depuis quatre ans, le scoutisme est avant tout une activité sociale : « C’est un lieu de rencontre, de partage, où l’on apprend à vivre en groupe, à écouter les autres, à nuancer ses propos, bref à prendre sur soi tout en développant une certaine maturité. »

 


Quelques témoignages

Indri et Ciccaba, scoutes épanouie


Indri et Ciccaba, noms detotem désignant respectivement un petit singe et une sorte de chouette, ont 14 ans. Scoutes depuis l’âge de 6 ans, elles fréquentent une patrouille d’éclaireuses de Namur. D’origine franco-belge, Ciccaba a déjà pu constater les différences de vues des Français vis-à-vis du scoutisme. « Quand je dis à mes cousins français que je vais chez les scouts, ils sont toujours étonnés. Pour eux, c’est forcément très chrétien et sérieux. à les entendre, on dirait que les scouts sont plus stricts et fermés en France qu’en Belgique, notamment au niveau de l’uniforme. » Qu’est-ce qui leur plaît dans le scoutisme ? « Je ne suis pas vraiment la même aux scouts, je suis plus « moi » », nous explique Ciccaba. Indri renchérit : « ça permet de se déconnecter, de décrocher de la routine, c’est une libération. On attend le camp d’été toute l’année. C’est génial : chaque matin, il y a quelque chose de nouveau et d’inconnu qui nous attend.»

 

Isard, chef de meute


Isard (chamois), qui est devenu chef d’une meute de louveteaux, et a donc repris le titre d’Akela, possède également de la famille française. « En France, le scoutisme a souvent la réputation d’être un héritage pétainiste et très catho. à l’inverse, je pense que le scoutisme en Belgique a fait l’objet de beaucoup de remises en question. La fédération insiste beaucoup là-dessus, peutêtre même un peu trop parfois : il faut quand même aussi éviter le côté “bisounours“, trop édulcoré. C’est pourquoi certains groupes prennent parfois un peu de recul par rapport aux recommandations de la fédération, le but étant de trouver un juste milieu, tout en préservant la convivialité du mouvement. » Qu’apprend-t-on selon lui en étant scout ici ? « C’est la meilleure école pour apprendre à vivre en groupe ! Mais ça développe aussi un fameux esprit de débrouillardise, et le goût de faire les choses par soi-même. » On en apprend beaucoup sur soi-même aussi, notamment à travers le quali (qualificatif) et la promesse : « mon quali, déterminé par mes chefs quand j’avais 13 ans, c’était “prends les commandes“ : ils ont vu juste ! »

Gaëlle, maman française convertie au scoutisme belge

Avant son arrivée en Belgique, Gaëlle était assez réfractaire au scoutisme. Convaincue par une amie qu’en Belgique, « ce n’est pas pareil qu’en France », elle se félicite aujourd’hui d’avoir inscrit ses deux filles, Albane (8 ans) et Pauline (12 ans) à l’unité du Rosaire de l’avenue Montjoie à Uccle. « Dès le premier contact, j’ai été séduite par la convivialité de la troupe et le dévouement des animateurs. L’ambiance est décontractée, les jeunes apprennent à couper le cordon, loin des modes et des consoles de jeu. Et puis j’y ai retrouvé des valeurs d’inspiration chrétienne, certes, mais qui me tiennent à coeur, comme le respect, le partage et la solidarité. En Belgique, le scoutisme fait partie du paysage, croyant ou pas croyant.»


 


Cotisation

 

 

Celle-ci couvre les frais d’assurance RC, soins de santé et assistance à l’étranger.

Scouts et les Guides catholiques : entre 24,5 et 37,5 € par enfant et par an selon le nombre d’enfants inscrits et vivant sous le même toit.

Scouts et Guides pluralistes : variable d’une unité à l’autre : environ 50 .

 

Coordonnées

Les Scouts, Fédération des scouts Baden-Powell de Belgique : « Le 21 », 21 rue de Dublin, 1050 Ixelles, tél : 02 508 12 00 , mail : lesscouts@lesscouts.be, site : lesscouts.be.

A noter que la participation aux quelques premières réunions est gratuite, le temps pour votre enfant de confirmer ou non son intérêt pour l’aventure. 

Les Scouts et Guides Pluralistes : 38 avenue de la Porte de Hal, 1060 Saint-Gilles, tél: 02 539 23 19, mail : info@sgp.be, site: sgp.be

Les Guides Catholiques de Belgique : « Le Carrick », 35 rue Paul-Emile Janson, 1050 Bruxelles, tél : 02 538 40 70 ou mail : gcb@guides.be, site : guides.be

La troupe Saint Bruno (Scouts d'Europe) : 77, rue de la Mutualité, 1180 Uccle, tél : +32 2 346 92 12 ou mail : troupe9m@gmail.com, site : www.troupesaintbruno.be

 

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