Indépendant ou en société ?

Paru dans JV 21 - Oct-nov 2010 | Texte : Frédéric Lejoint

Que ce soit par préférence personnelle ou en raison de circonstances professionnelles, de plus en plus de travailleurs optent en Belgique, pour un statut d’indépendant.

C'est un statut intéressant qui offre de la souplesse et correspond au désir de créer sa propre activité, mais dont il faut bien connaître au départ les implications. Il faut notamment être conscient de la moindre protection sociale accodée à l'indépendant par rapport au salarié.

La question se pose aussi pour l'indépendant de savoir s'il doit et quand il doit, monter sa société.

 


Prendre le statut d'indépendant

 

 

 

Contrairement à la France où il existe plusieurs filières d’inscriptions (commerçants, artistes, professions libérales), le système est centralisé en Belgique.

« Les travailleurs indépendants sont soumis au même régime, quelle que soit leur activité propre », souligne Hubert De Clercq (Inasti).

 

Etape 1 : ouvrir un compte à vue professionnel dans une banque belge

 

Etape 2 : s'incrire dans un Guichet d’entreprises

 

Il existe neuf guichets d'entreprises (Acerta, UCM, Partena, Securex, etc), qui totalisent environ deux cents succursales dans le pays.

Le guichet choisi se charge de l’inscription auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE), qui délivre alors un numéro d’entreprise, qui sera utilisé pour tous les contacts de l’indépendant avec les autorités. Cette inscription a permis de remplacer les nombreuses formalités qu’il fallait auparavant faire avec diverses administrations, et le coût de l’inscription est assez modeste.

Coût de l'inscription : 75 euros.

Pour certaines activités, il est demandé de prouver certaines connaissances en gestion d’entreprise.

Pour certaines professions réglementées, il faut posséder un diplôme spécifique (site : belgium.be).

Via la BCE, il est possible également de signaler sa mise en route d’activité à l’office de contrôle de la TVA. Cela vous permet éventuellement de bénéficier par la suite de ce régime, à la condition que votre activité se révèle être admissible.

 

Étape 3 : inscription à une caisse d’assurances sociales pour indépendants

 

Cette inscription est obligatoire, et doit se faire au début de l’activité.

Si l’indépendant ne s’inscrit dans aucune caisse, il sera inscrit d’office chez la caisse publique Zenito (anciennement CNASTI), auprès de laquelle il sera tenu de régulariser sa situation.

Les caisses d’assurances sociales collectent les cotisations sociales tous les 3 mois, en échange d’assurer la protection sociale du travailleur indépendant, qui va de la constitution d’une pension jusqu’à l’assurance maladie et au remboursement des dépenses de santé.

 

Etape 4 : l’affiliation auprès d’une mutuelle afin de pouvoir bénéficier des remboursements médicaux.

 


Quand payer les cotisations sociales ?

 

En Belgique les cotisations sociales sont versées dès le début de l’activité sur une base forfaitaire (entre 620 et 650 euros par trimestre en début d’activité), contrairement à la France, où les cotisations sont exigées durant la deuxième année d’activité (avec parfois des ajustements douloureux),

Une fois tous les revenus définitifs connus par l’administration (en 2013 si le début de l’activité a lieu en 2010), un ajustement sera exigé.

 

Calculer le montant de ses cotisations sociales

Il existe plusieurs modules en ligne qui permettent de calculer les cotisations sociales qui seront dues (par exemple e-services.ucm.be).

 

 

Les cotisations par tranche de revenu annuel brut :

 

Jusqu’à 51.059,94 euros de revenus annuels bruts : les  cotisations sociales représentent 22% du revenu brut.

De 51.059,94 euros à 75.246,19 euros de revenus annuels bruts : le prélèvement tombe à 14,16% du revenu brut.

Pour les tranches supérieures : aucune cotisation n’est due. Le maximum versé s’élèvera à 14.658 euros, auxquels s’ajouteront des primes de gestion, soit entre 3 et 4,5% des cotisations.


Fiscalité et frais des indépendants

 

L’impôt sur les revenus (ISR) est progressif en Belgique, comme en France, Les charges professionnelles devront être directement payées par l’indépendant, alors que le salarié n’a pas à s’en charger.

Le salaire brut imposable d’un salarié et d’un indépendant sont taxés de la même manière, soit 25% sur les premiers 7.900 euros, et progressivement jusque 50% au delà de 34.330 euros de revenu brut.

 

Faire baisser son assiette d’imposition quand on est indépendant.

 

Il existe pour cela, deux postes principaux :

 

1° Les cotisations sociales (et des versements comme ceux relatifs à une assurance pension complémentaire) peuvent être déduites intégralement du revenu brut.

2° Les frais professionnels bénéficient d’un statut beaucoup plus étendu et favorable qu’en France. Si les possibilités de déclarer des frais professionnels en tant que salarié sont réduites, les indépendants pourront faire jouer ce poste au maximum.
 
Dans l'exemple étudié, on peut voir de quelle manière les frais professionnels peuvent réduire tout à fait sensiblement la pression fiscale, en se basant sur des frais à hauteur de 20% du revenu brut.


La couverture sociale des indépendants


Le gros point noir du statut d’indépendant en Belgique sera les grandes différences qui persistent avec la couverture sociale des salariés, partiellement justifiées par le fait qu’un indépendant fera moins de versements qu’un salarié, et cela proportionnellement à son revenu brut.

 

Désavantages par rapport aux salariés :

 

- La pension pour indépendant est notoirement plus faible que la retraite des salariés, en dépit des diverses mesures prises ces dernières années pour la revaloriser. Pour assurer ses arrières, il faudra penser à souscrire une Pension Complémentaire Libre pour indépendant afin de se constituer un complément de retraite. « C’est un des meilleurs investissements grâce aux avantages fiscaux qui font baisser le revenu imposable », souligne Hubert De Clercq.

- Le congé de maternité des indépendants est plus court (6 à 8 semaines contre 15 semaines pour les salariés),

- Les allocations familiales sont parfois inférieures à celles des salariés

- L’incapacité de travail ou le chômage sont très mal couverts. (inasti.be).


Bien s'entourer

L'indépendant a tout intérêt à s'associer les services d'un notaire, d'un comptable, d'un conseiller de caisse sociale et éventuellement d'un avocat fiscaliste et patrimonial.

Un notaire

C'est un soutien indispensable pour tous les aspects de droit civil. Un comptable pour les questions fiscales liées à la vie quotidienne (déduction de frais professionnels).

 

Un conseiller d’une caisse sociale

Si vous désirez plus d’éclaircissements sur vos droits et obligations.

 

Un avocat fiscaliste et patrimonial

Si l’activité peut atteindre une taille importante, le recours à un avocat fiscaliste et patrimonial peut s'avérer utile.

 


Quand faut-il monter sa société ?

Pour un indépendant, le passage en société se justifiera pour plusieurs raisons:

- Au niveau du droit civil, le patrimoine d’un indépendant serait en effet engagé s’il fait faillite (en dehors du domicile privé qui est protégé). « Toutefois, si une société a besoin de financements bancaires, des garanties impliquant le patrimoine personnel seront souvent exigées », souligne Manoel Dekeyser (avocat fiscaliste et patrimonial chez Dekeyser, de Brauwere & associés).

- Le passage en société se justifiera également pour diminuer la pression fiscale qui peut peser sur les épaules de l’indépendant.

 

 

EXEMPLE :

 

Dans le cas de figure d’un indépendant qui gagne 200.000 euros par an, le net par rapport au brut représentera environ 43%, en prenant en compte des frais professionnels de 20.000 euros.

Revenus bruts : 200.000 euros
Frais : 20.000 euros
Cotisations sociales : 15.171 euros
IPP : 78.243 euros
Salaire net : 86.586 euros
Net/brut : 43 %

 

Supposons maintenant que l’indépendant passe en société. Un salaire de 40.000 euros sera versé au dirigeant.

Chiffre affaire : 200.000 euros
Frais : 20.000 euros
Salaire brut : 40.000 euros
dont cotisations sociales : 9.108 euros
dont IPP : 11.446 euros
Salaire net : 19.446 euros
Bénéfice brut : 40.000 euros
isoc 43.525 euros
Epargne en société 96.475 euros
   
   
SOIT versement dividendes (PM=15%) 14.471 euros
dividendes perçus 82.004 euros

résultats (salaire net + div. perçus)

19446 + 82004 =

1014 euros
net/brut  50,7 %
   
SOIT liquidation (PM=15%) 9.648 euros
Perçus 86.828 euros

Résultats (salaire net + Perçus)

19446 + 86.828 =

1062 euros
Net/brut  53,1 %
   

SOIT sortir les fonds sans impôt

par une organisation adéquate

0 (%)

Perçus

96.475 euros

Résultats (salaire net + Perçus) 19446 + 96.475 =

11592 euros

Net/brut

 57,9 %

 

Explications :

 

Un salaire de 40.000 euros sera versé au dirigeant. Les 140.000 euros restants constitueront le bénéfice brut de l’entreprise sur lequel l’impôt des sociétés s’appliquera.

 

Le solde bénéficiaire pourra être sorti de la société de trois manières :

1) Sous forme de dividendes (précompte mobilier de 15%) pour un revenu global (salaire net + dividende) de 50,7% du brut.

2) En laissant le solde dans les réserves, qui seront alors taxés à 10% en cas de liquidation de la société. Le revenu global se monte alors à 53,1% du brut.

3) En sortant l’argent de la société sans frais si son passif est structuré correctement. Dans ce cas, le revenu global se montera à 57,9% du brut.

 

Conclusion :

Entre le statut d’indépendant et la société, il y a dans notre exemple une différence de 30.000 euros, ce qui n’est pas négligeable.

« Le passage en société sera intéressant si l’épargne réalisée (revenus - train de vie) est de 40.000 à 50.000 euros », tempère Manoël Dekeyser, compte tenu des frais de création et d’entretien de la société.

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