Tournai

Paru dans JV 45 et HS BA 2014-2015 | Texte : Chloé Andries

Avec 1 habitant sur 10 de nationalité française, Tournai est la plus française des villes belges. Située à quinze minutes de Lille et de Courtrai, cette frontalière est aussi très européenne.

Les Bruxellois la voient encore parfois comme une cité du Hainaut située « là bas loin » où il n’y a pas grand-chose à faire. Les Parisiens, quant à eux, ne savent pas toujours s’il s’agit d’une ville française ou belge. Quant aux Flamands, ils la regardent souvent comme une Wallonne qui n’a que peu à voir avec eux.

Pourtant, Tournai est sans doute la plus française des villes belges et la plus flamande des villes wallonnes ! Sa position de carrefour stratégique en a toujours fait une ville multiculturelle, faite d’échanges et de mélanges.

Un joyau architectural

En arrivant à Tournai, premier élément : le rappel de l’Histoire est partout. Chaque rue, fronton, église évoque la richesse d’une ville dont l’architecture mélange style roman, gothique (c’est même à Tournai qu’apparaît ce style en Belgique), Renaissance, classicisme ou encore Art nouveau (près de la gare). Autant d’éléments qui font de la ville un joyau architectural mais qui rappellent aussi que toute son histoire est celle d’un carrefour stratégique d’influences. Première capitale du royaume des Francs et ville de naissance de Clovis, Tournai sera un temps divisée par l’Escaut entre le royaume de France et le Saint Empire germanique, connaîtra l’influence du Comté de Flandre, deviendra même au XVIe siècle Anglaise sous Henri VIII, fera partie des Pays-Bas sous Charles Quint, puis de nouveau en 1815, après d’autres parenthèses, Française, Bourguignonne et même Autrichienne.

Mais si les guides touristiques vantent sans peine la richesse quasi « muséale » de la ville, de sa magnifique cathédrale et ses cent clochers, ils occultent souvent le visage contemporain de Tournai, qui se vit bien au-delà de son patrimoine.

Ville de l’Eurorégion

« On pense souvent à notre ville comme le point d’intersection Belgique-France. Mais elle est aussi la porte vers la Flandre. Tournai est une des pointes du triangle Lille-Courtraiv-Tournai », signale Rudy Demotte. La ville est ainsi engagée dans l’Eurométropole Lille-Tournai-Courtrai, premier Groupement Européen de Coopération Territoriale en Europe (GECT). Au niveau culturel, des efforts conjoints permettent d’améliorer l’offre proposée, comme le festival NEXT, qui voit collaborer les structures de Lille Métropole, Valenciennes, Courtrai et Tournai (voir notre agenda p.116). Se placer dans une perspective européenne permettrait aussi de régler des problèmes plus « prosaïques » mais fondamentaux et qui freinent la mobilité des habitants de cette zone frontalière comme les soucis d’harmonisation des diplômes pour les étudiants, ou encore la qualité de l’offre ferroviaire sur la ligne Lille-Tournai.

Pour l’heure, la ville de Tournai se lance dans des projets d’envergure, destinés à accroître l’attrait socio-économique et touristique de la Ville. Cela passe par des projets conséquents de rénovation du centre-ville, entamés en 2012 (le seul budget consacré à la cathédrale atteint les 27 millions d’euros investis par la Wallonie et chapeautés par Vincent Brunelle, architecte en chef des Monuments historiques dans plusieurs départements... français). Dans le secteur de l’innovation, Tournai accueille déjà L’eurometropolitan e-Campus, à Marquain, un campus inter-universitaire dédié au web et à vocation internationale, adossé à un parc scientifique accueillant spin offs et entreprises scientifiques. à cela se greffe le projet européen d’aménagement d’une vitrine technologique et d’un pôle muséal interactif en centre-ville, ainsi qu’un pôle d’excellence spécialisé dans les technologies de l’information et de la communication, toujours en lien avec l’e-campus. Des dossiers européens encore en gestation mais qui préfigurent la mutation d’une ville désireuse de renouer avec un destin flamboyant.


Située à 15 minutes de Lille, autant de Courtrai, Tournai est et reste transfrontalière dans l’âme. Sur ses 70.000 habitants, 7.000 sont Français.

« Il y a deux types de Français installés à Tournai, explique Rudy Demotte, bourgmestre de la ville. Ceux qui viennent bénéficier des avantages d’une ville de moyenne dimension, avec la sérénité que l’on retrouve dans les villes du Nord. Ils investissent (souvent en centre-ville) des biens immobiliers de haute valeur à des prix moindres qu’en France, qu’ils restaurent. L’autre catégorie s’installe dans les communes vertes (Tournai est composée de 30 communes et 40.000 habitants sur les 70.000 habitent dans la ceinture verte de Tournai, soit dans l’une des 29 communes vertes). Ce sont des “rurbains”, des personnes venues profiter de l’avantage d’habiter à la campagne tout en restant à proximité d’une grande ville. Tournai, c’est en quelque sorte le jardin entre Lille et Bruxelles, une zone encore verte entre deux grandes agglomérations. » La qualité de vie, le moindre coût de l’immobilier, la proximité de Lille, le système fiscal belge plus clément envers les plus fortunés, tout cela explique en partie l’attrait constant de la ville belge. De grands noms de l’économie française ont donc traversé la frontière, comme la famille Mulliez (Auchan) mais aussi de plus en plus de familles ou jeunes couples désireux de bénéficier d’un cadre de vie agréable et d’un prix de l’immobilier accessible à deux pas de la Métropole lilloise.

Pour Me Yves Van Roy, notaire à Pecq, « ce que recherchent les Français fortunés est souvent un cadre de vie, un endroit calme et de l’espace. Châteaux, grosses demeures et immeubles de prestige correspondent souvent à leurs desideratas. Le reste de l’immobilier, qui représente 95% du marché immobilier de la Wallonie picarde, n’a pas été influencé par ces investissements. » Et le notaire d’ajouter que « dans les régions frontalières, quelques Français du Nord, souvent employés ou fonctionnaires, ont trouvé leur bonheur en acquérant des immeubles dont le prix est souvent de 15 à 20 % moins cher que dans le Nord de la France et dans un environnement souvent plus convivial. Pour ce genre de biens et dans ces régions, quelques ressortissants français ont ainsi en partie contribué à la hausse générale des prix depuis 2000. »

Aujourd’hui, sur le marché immobilier tournaisien classique, il faut compter 195.000 euros pour une maison 4 façades et de 90 à 150 euros/m2 pour un terrain à bâtir, le prix s’élevant à mesure qu’on s’approche du centre-ville.

95 % d’étudiants français à Saint-Luc

Autre atout de Tournai : les écoles supérieures et universités, nombreuses et de grande qualité. Les écoles Saint-Luc, qui proposent notamment des études supérieures de photo, mode, publicité, graphisme et architecture (cette dernière étant une université rattachée à l’UCL) comptent 95 % d’étudiants français ! Il est d’ailleurs amusant de se rappeler qu’à l’origine, les établissements Saint-Luc étaient Français et se sont établis à Tournai au moment de la loi française de séparation entre l’église et l’état (1905). Dans d’autres sections, notamment paramédicales, le système des quotas réservés aux non-résidents a fait chuter le nombre d’étudiants français inscrits mais pas l’attrait des formations. En kiné, à la Haute-école Condorcet, sur 87 places ouvertes, on compte ainsi 648 candidats français, « ce qui mène parfois à des aberrations, avec des étudiants habitant à 5 kilomètres de Tournai mais côté français qui se voient refuser l’accès à la formation » explique Rudy Demotte.

Et les échanges entre les deux pays ne s’arrêtent pas là. Au niveau économique, 16 % des travailleurs tournaisiens sont Français. Et les relations franco-belges économiques vont dans les deux sens, comme en témoigne le succès de plusieurs entreprises comme la société familiale tournaisienne Dufour, active jusque Lille et Dunkerque.


En voiture

Tournai se situe à 15 min de Lille et 1h de Bruxelles (autoroute A8, sortie 34). Le stationnement est payant dans le centre, sauf le dimanche. Parking gratuit le long des boulevards qui encerclent la ville ou sur les aires dédiées, au quai Sakharov ou à l’Esplanade de l’Europe.

En train : Départ de Bruxelles toutes les heures, et toutes les 30min aux heures de pointe, env. 1h de trajet. Site : sncb.be.

Louer un vélo

Sur place, l’idéal est de circuler à vélo pour découvrir le centre historique de la ville, ses « 5 clochers », les berges de l’Escaut. à la gare, un service « blue bike » propose des locations. Site : blue-bike.be.


La chambre du couvent

Cette chambre d’hôtes (4 épis) avec vue sur l’Escaut se situe au sein de l’ancien couvent des Rédemptoristes, en plein centre historique, une situation idéale. Pascale, ancienne guide touristique, sait parfaitement conseiller ses hôtes. 79 €/nuit, petit-déj : 10 €. 6 Quai Notre Dame – T. 04 73 68 21 04, site : lachambreducouvent.be.

Le clos du pommetier

En dehors de la ville, gîte 5 épis pour 4 personnes, avec grand jardin et espace wellness. 480 € pour deux nuits, 680 € pour quatre nuits. 39 rue Joseph Gorin – T.  0475 876 986, site : le-clos-du-pommetier.be.


Eva Cosy

Idéal pour prendre un petit-déjeuner, boire un thé ou déjeuner, à deux pas de la grand-place, dans un cadre charmant et calme. Depuis 10 ans, Jo propose des produits frais et de qualité, du pain aux tartes salées ou sucrées, en passant par le buffet chaque midi. Tous les Tournaisiens que nous avons rencontrés nous ont parlé de cette adresse... à raison. Petit-déjeuner : 6,50 €, assiette : 12,50 €. 6 rue Piquet – T. 069 77 22 59, du lu au sa 8h30-18h, di 15h-18h.

L’épicerie

Ce petit resto ouvert par deux jeunes tournaisiens propose des plats traditionnels revisités dans un esprit cuisine du monde, avec des suggestions nouvelles chaque semaine. Ambiance conviviale et sans fausse prétention, produits de qualité. Compter 15 à 18 € plat-dessert. 27 rue du Cygne – T. 069 23 49 00, lu et ma 11h30-17h, me-sa 11h30-0h.

Corto malté

Pour prendre l’apéro sur une large et agréable terrasse aux beaux jours, le long de l’Escaut. Une clientèle mélangée et branchée se donne rendez-vous dans ce bar-restaurant au design industriel. 18 quai Saint-Brice – T. 069 223 400, site : cortomalte.eu. Du ma au sa 12h-15h et 18h-00h, di 17h-22h.


TAMAT (Musée de la tapisserie)

Voilà un musée qui prouve en un coup d’œil que la tapisserie est un art bien vivant. Grâce à une muséographie sobre et claire, on observe les mutations stylistiques opérées dans cet art de la fin du Moyen-âge à nos jours. Chaque année, des bourses sont accordées à des artistes dont le travail est ensuite exposé, et les deux restaurateurs attitrés du musée ouvrent leur atelier (lu, me-ve 10h-17h).

9 place Reine-Astrid – T. 069 23 42 85, site : tamat.be. Nov-mars : tlj 10h-12h, 14h-17h fermé ma. Avril-oct : 10h-17h30, fermé ma. Prix : 2,60 €, gratuit le 1er di du mois.

Musée des Beaux-arts

Conçu par Victor Horta, ce musée vaut le détour rien que pour son architecture et sa collection permanente, où se côtoient des pépites parmi lesquelles des Brueghel, Rubens, Van Gogh ou encore Toulouse Lautrec. Jusqu’au 28 septembre, des dessins de jeunesse de James Ensor seront exposés.

Enclos Saint-Martin – T. 069 33 24 31, site : tournai.be/musee-beaux-arts. Prix : 2,60 €, gratuit le 1er di du mois.

Galeries

La galerie d’Art contemporain Rasson Art Gallery expose régulièrement les artistes dont elle s’occupe en Belgique parmi lesquels Robert Combas, Emmanuel Barcilon ou Cédric Bouteiller (Site : rassonartgallery.be, je-di 14h-18h30). Pour découvrir de jeunes talents, poussez la porte du 38 quai Notre-Dame, où des artistes de sérigraphie et art numérique organisent des expos (site : 38quainotredame.com, sa-di 14h30-18h si expo), ou celle de la Drawing Box, dédiée au dessin (site : thedrawingbox.be, ve-di 14h30-18h30 si expo).


Marché aux puces

Le parking du centre commercial les Bastions se transforme en marché aux puces chaque dimanche. Un rendez-vous réputé dans toute la Belgique, où l’on trouve le meilleur comme le pire, mais où l’on fait encore des affaires.

Dimanche 6h-13h, Centre commercial Les Bastions.

Passé composé

Dans une ancienne imprimerie des années 1940, Thierry Delannoy donne une nouvelle âme à des meubles anciens, industriels ou encore des objets de curiosités en tous genres. Du vieux meuble de dentiste décapé jusqu’aux lampes industrielles en passant par une vache didactique en plâtre, impossible de définir le style de ce chineur invétéré, il faut aller jeter un œil. Sa passion, il la partage avec sa femme Sylvie, décoratrice, qui tient une boutique de déco en centre-ville. Le couple tient même un gîte pour 4 à 6 personnes, spacieux et décoré avec goût, où ils vous accueillent avec la gentillesse qui les caractérise. Comptez 390 €/2 nuits, 510 €/7 nuits.

Antiquités – 48 bv des Combattants, sa 10h-12h et 14h-18h30 • Boutique du centre – 28 B rue Saint Martin • Gîte – 78 chée de Douai – T. 0475 28 75 85 ou 04 76 24 49 10. Site : passe-compose.be.

Tournai et ses environs offrent de larges possibilités de balades et randonnées. Au Mont-Saint-Aubert, choisir les chemins du Reposoir ou celui des poètes : très beaux panoramas sur la vallée de l’Escaut. Rens à l’office du tourisme, 1 pl Paul Emile Janson – T. 069 22 20 45, site : visittournai.be.

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